Du cortège des Saints
Dimanche 1er novembre 2020
Evangile selon Saint Matthieu 5, 1-12 :
Ecouter l’homélie :
Frères et sœurs bien-aimés,
En ce jour de la Toussaint, la Liturgie nous invite à lever nos regards vers le Ciel. Avec Saint Jean[1] nous y contemplons la Trinité Sainte dans sa gloire entourée de cette multitude d’Anges mais également de cette « foule immense que nul ne peut dénombrer » (Ap 7, 9). Debout devant le Trône de Dieu, « vêtus de robes blanches avec des palmes à la main » (Ap 7, 9), voici que cette foule se prosterne devant la majesté divine déclarant d’une voix unanime :
Amen ! Louange, gloire, sagesse et action de grâce, honneur, puissance et force à notre Dieu, pour les siècles des siècles ! Amen ! (Ap 7, 12).
« Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d’où viennent-ils ? » (Ap 7, 13)
Saint Jean, dans sa vision apocalyptique, nous précise qu’ils viennent « de toutes nations, tribus, peuples et langues » (Ap 7, 9). Ils viennent donc du monde d’ici-bas, de cette terre depuis laquelle nous faisons monter vers Dieu en ce jour la même action de grâce.
« Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d’où viennent-ils ? » (Ap 7, 13)
A cette question la majesté divine répond : Ils « viennent de la grande épreuve ; ils ont lavé leurs robes, ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau » (Ap 7, 14). Cette foule immense que nul ne peut dénombrer est donc le cortège des Saints, de ceux qui ici-bas se sont montré dignes du Royaume des Cieux en se mettant à la suite du Christ.
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Dans cette foule innombrable nous contemplons « en premier lieu la Bienheureuse Marie toujours Vierge, Mère de notre Dieu et Seigneur Jésus Christ »[2]. Elle est là, « Fille de Roi, dans sa gloire, toute vêtu d’or » (Ps 44, 14).
Nous reconnaissons les Saints Patriarches et Prophètes : Abraham, Isaac, Moïse, Elie, Jérémie… mais également Saint Jean-Baptiste comme le glorieux Saint Joseph. A leurs côtés se tiennent les Saint Apôtres, ceux que le Seigneur a choisis pour fonder l’Eglise, au nombre desquels se tient Saint Pierre tenant fermement les clefs du Royaume des Cieux (Cf. Mt 16, 19).
Et puis nous découvrons le cortège innombrable des Saints Martyrs, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui. Nous reconnaissons aux côtés des Saints Innocents[3], Saint Etienne le premier martyr[4], Saint Laurent, Sainte Agnès, Sainte Cécile, Saint Denis évêque de Paris et Saint Sernin le premier évêque de Toulouse, de qui nous avons reçu l’Evangile. Plus proche de nous voici l’abbé Jacques Hamel égorgé au pied de l’autel le 26 juillet 2016 alors qu’il venait de célébrer le saint sacrifice de la Messe. Près de lui se tiennent, à n’en point douter, les trois martyrs de Nice, lacérés, égorgés, décapités en la Basilique Notre Dame jeudi dernier. Eux dont le sang est venu entacher leur vêtement, les voilà blanchis par le sang de l’Agneau de Dieu, palmes à la main.
A ce cortège de la grande épreuve nous entrevoyons les Saints Pasteurs de tous les temps, accompagnés de leur peuple : Saint Grégoire et Saint Jérôme, Saint Augustin et Saint Ambroise, Saint Martin de Tours et Saint François de Sales, Saint Jean-Paul II et les Saints Pontifes côtoyer Saint Jean-Marie Vianney, le modeste curé d’Ars.
Et puis voici l’éclatant cortège des saintes Vierges au nombre desquelles nous reconnaissons Sainte Geneviève et Saint Jeanne d’Arc, Sainte Thérèse de Lisieux, Sainte Germaine de Pibrac mais également notre petite bigourdane, Sainte Bernadette.
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Dans l’immensité de cette foule que nul ne peut dénombrer se tiennent également les Saints anonymes, ceux dont la sainteté a échappé aux regards des hommes et de l’Histoire mais non point au regard de Dieu. Accueillis immédiatement à leur mort au Royaume des Cieux, ils sont les bons et fidèles serviteurs qui entrent dans la joie de leur Maître (Cf. Mt 25, 23). Ils sont victorieux, palmes à la main et immaculée dans leur robe blanche.
« Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d’où viennent-ils ? » (Ap 7, 13)
Ce sont les pauvres de cœur qui ici-bas, au temps de la grande épreuve, se sont ouverts à la richesse de la grâce divine et ont vécus les béatitudes (Cf. Mt 5, 1-12). C’est le cortège des humbles, des cœurs purs de toutes malices et compromissions. Ce sont les miséricordieux, les artisans de paix, ceux qui ici-bas ont pleurés leurs fautes comme ils ont su compatir aux douleurs du prochain jusqu’à être affamés et assoiffés de justice. Beaucoup ont été insultés et persécutés à l’image des chrétiens d’Orients à cause de leur attachement au Christ. Les voici victorieux de la grande épreuve, palmes à l’appui, revêtu du vêtement des noces de la Rédemption (Cf. Mt 22, 1-14). Accueillis par Notre Seigneur – l’Agneau de Dieu – ils sont à présent dans l’allégresse du Royaume des Cieux.
C’est cette action de grâce que nous portons en ce jour, frères et sœurs bien-aimés, où avec l’Eglise nous sommes heureux de savoir beaucoup de nos frères et sœurs sauvés.
Saints et Saintes de Dieu, priez pour nous qui vivons encore l’heure de la grande épreuve, celle qui vérifiera la qualité de notre foi (Cf. Jc 1, 1-3). Saints et Saintes de Dieu, priez pour nous qui vivons encore l’heure de la grande épreuve, peut-être celle du retour du Christ.
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Lorsqu’avec la fin de ce jour la nuit tombera, notre action de grâce pour les Saints deviendra une prière suppliante pour tous les défunts qui en purgatoire réparent leurs fautes. Nous prierons pour eux afin qu’ils entrent au Royaume de Dieu, là où il n’y a plus ni larmes ni deuil mais la joie et la paix (Cf. Ap 21, 4).
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Alors qu’un nouveau confinement a été décrété et que nous risquons une nouvelle fois d’être privé du culte rendu à notre Grand Dieu, résistons par nos prières et l’offrande de nos sacrifices. Invoquons la puissante intercession de la Vierge immaculée comme celle du cortège des Saints. En les contemplant en cette solennité nous entendons Saint Jean dans son épître déclarer que parce que nous sommes enfants de Dieu, par ce Baptême qui nous a plongé dans le sang de l’Agneau, nous n’avons d’autre destination que le Ciel :
Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. Nous le savons : quand cela sera manifesté, nous serons semblables [à Dieu] car nous le verrons tel qu’il est. (1 Jn 3, 1-3)
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Puisse le Seigneur nous donner la force de sa grâce puissante pour vivre ces temps difficiles au sein d’une France attaquée, éprouvée, divisée, désordonnée qui récolte ce qu’elle a semé : l’ivraie d’un monde sans Dieu. Prions pour que la France puise dans ses racines chrétiennes la sève de l’Evangile qui non seulement a vu fleurir tant de saints et de saintes mais qui porte en germe la puissance de son relèvement, la puissance de sa résurrection d’entre les morts. Ainsi soit-il.
abbé Benjamin MARTIN
[1] Cf. Première lecture : Ap 7, 2 – 4 ; 9 – 14.
[2] Cf. Canon romain.
[3] Cf. Mt 2, 16-18.
[4] Cf. Ac 6 et 7.